Valérie Macrez, déléguée générale de l’ASLOG (Association Française pour la Logistique – premier réseau de professionnels de la logistique en France), a introduit le débat en présentant le contexte actuel et l’importance croissante de la supply chain. Aujourd’hui, le développement de cette compétence concerne toutes les entreprises et ce, quel que soit leur secteur ou leur activité. La logistique est un levier qui permet de mettre en pratique la stratégie de l’entreprise. De fait, de plus en plus de directeurs d’entreprise sont issus de cette filière.

C’est ensuite Didier Granger, CEO d’OEMServices, qui a pris la parole pour présenter les enjeux d’une logistique maîtrisée dans le secteur de l’aéronautique. Son entreprise propose un support logistique personnalisé aux équipementiers en tant qu’interface auprès des compagnies aériennes mais également directement auprès de ces dernières. Effectivement OEMServices propose entre autres aux équipementiers un service de hotline ouvert 24/7 donnant accès aux compagnies aériennes à des pièces de rechange localisées dans les principaux aéroports mondiaux. Le support proposé directement aux compagnies aériennes se compose notamment de services de support à l’heure de vol, de gestion de réparation et de vente de pièces neuves ou de seconde main.

Mr Granger a souhaité commencer par présenter les défis qui sous-tendent l’activité des compagnies travaillant dans l’aéronautique: les réglementations fortes et variées qui sont une réelle contrainte voire un frein pour la logistique, le traitement des urgences dont la notion d’AOG (Aircraft On Ground), la nécessité de monter en compétence ses personnels afin de suivre l’évolution du secteur et se démarquer de la concurrence. Il nous a ensuite mentionné que la logistique aéronautique était très segmentée et interconnectée. Elle fait intervenir de nombreux acteurs intermédiaires entre l’avionneur et les compagnies aériennes, renforçant d’autant plus le besoin d’une supply chain efficiente. A l’avenir, Didier Granger envisage plusieurs scénarii de développement du secteur qu’il considère plein de potentiel. Il prévoit par exemple un fort développement de la maintenance préventive. Il s’agira alors de détecter les pannes avions avant qu’elles ne surviennent. La supply chain s’en trouvera modifiée : moins d’urgence à gérer, moins de stocks à travers le monde !

Afin de nous ouvrir un peu plus les portes de la supply chain aéronautique, Gérard Rovira, Sales & Operations Director chez Esterline nous a apporté le point de vue d’un équipementier. Esterline est un groupe américain qui emploie 13 000 personnes dans le monde. Il est spécialisé dans les interfaces humaines (électronique du cockpit et systèmes de vision) et les calculateurs de vol (équipements électroniques pour contrôler le bon fonctionnement de l’avion).

Il a tout d’abord parlé de la pression croissante exercée par les compagnies aériennes sur les équipementiers. Le marché s’accélérant, les compagnies veulent maintenant les avions dès qu’elles l’achètent. Cela a un impact important sur les équipementiers lors de la commercialisation d’un nouvel avion. Il faut désormais s’assurer qu’ils puissent suivre la montée en cadence. C’est pour cette raison que dans le cadre de la production de l’Airbus A350, un test à blanc a été effectué afin de s’assurer que les prestataires pourraient réaliser un changement de pièce dans les délais. Au-delà du service rendu, la supply chain a un rôle d’optimisation financière pour Mr Rovira. Elle permet de résoudre l’équation entre la volonté de réduire les stocks au maximum et la demande de fiabilité et de réactivité des clients. De plus, elle permet également de s’adapter puisqu’il faut désormais anticiper le besoin du client. Par le biais d’une supply chain rigoureuse suivant le principe des 3R « right part, right place, right time », Esterline améliore la communication envers ses clients, qui veulent savoir en continu où sont leurs pièces.

Résumé de l’édition

C’était avec le plus grand des plaisirs que le Master 2 Logistique Paris 1 (Panthéon-Sorbonne) organisait le 5 Novembre dernier la 5ème édition des Matinales de La Logistique. Cette dernière regroupait des professionnels de l’industrie du Luxe autour d’un thème restant bien mystérieux : « La Supply chain, créatrice de valeur pour les acteurs du Luxe ». C’est ainsi que Luc GAUCHEZ, Directeur Logistique de CHRISTIE’S, Christophe SARAFIAN, Directeur Supply Chain de LA MAISON DU CHOCOLAT, et Jean-Christophe ABER, fondateur de la société de conseil AXALTEC ont tour à tour donné leur point de vue sur le sujet avant de débattre certains aspects de leur présentation avec l’audience.

Pour Jean-Christophe ABER, l’information et sa capacité à l’exploiter, l’analyser et l’utiliser est sans nul doute un avantage compétitif majeur permettant de rendre plus efficace la Supply Chain. Effectivement gérer des productions effectuées en multi sites nécessite de savoir partager les informations essentielles sans pour autant donner accès à celles confidentielles. Mais il ne s’agit pas là que d’un partage d’informations pour une productivité augmentée mais bien également d’un outil de comparaison permettant aisément la mise en comparaison d’une vision coût face aux capacités de production. L’information lorsque que gérée efficacement s’avère être une pièce maîtresse d’une supply chain efficiente et dynamique.

De son côté, Christophe SARAFAIN nous a rappelé ce qui tenait tant à cœur à son entreprise, à savoir l’art du chocolat à la française, faisant ressortir toute l’expertise et le savoir faire accumulé pendant si longtemps. Pour lui, le métier de La Maison du Chocolat est celui de créer, fabriquer des œuvres, vendre des pièces artistiques imaginées par des spécialistes renommés afin de faire vivre à sa clientèle tout un éventail d’expériences. Dans ce contexte, la supply chain soutient le plan de développement à l’international de la compagnie tout en conservant les engagements attachés aux produits de haute qualité vendus. Cette dernière doit effectivement prendre en compte un renouvellement très fréquent (toutes les six semaines) de produits périssables et fragiles, sans pour autant perdre de vue la personnalisation du produit que ce doit d’offrir la Maison du Chocolat.

Finalement Luc GAUCHEZ nous a démontré que la supply chain de Christie’s ne s’arrêtait pas aux simples aspects du transport et des flux. Elle englobe en son sein des problématiques aussi bien douanières par la complexité et la diversité de la réglementation française, qu’une problématique commerciale. Dans le cadre des ventes aux enchères, Christie’s est bien évidemment amené à traiter des objets aussi divers que variés, forçant la supply chain de la société à pouvoir s’adapter perpétuellement. Il ne faudrait cependant pas oublié une problématique unique au monde des ventes aux enchères à savoir le privé. Les vendeurs de Christie’s sont également ses acheteurs. C’est dans ce cadre relationnel très complexe que la supply chain se doit d’être réactive, dynamique afin de maintenir de bonnes relations.

Bien que provenant d’entreprises différentes, évoluant ainsi sur des produits de luxe bien distincts les uns des autres, il apparaît évident que pour nos trois professionnels du monde du luxe, la supply chain est bien plus qu’une simple gestionnaire de flux, c’est avant tout une supply chain de projet à la fois créatrice et innovatrice.